L'utopie, c'est d'abord l'histoire de la rencontre entre Thomas More et un certain Raphaël qui s'engage dans le récit de ses voyages dans un pays nommé
Utopie et dont la capitale est
Amaurote.
Raphaël dresse un éloge particulièrement précis de ce pays qui semble répondre à des règles bien singulières pour l'époque mais étonnement modernes et visionnaires; aussi on peut deviner chez Raphaël le bonheur qu'il a ressentit de découvrir la
république chez les Utopiens alors que partout ailleurs règnent des rois omnipotentsqui maintiennent sous leur joug des paysans affamés, des citadins qui mendient et une économie exsangue.
More au travers du discours de Raphaël dépeint un monde où le travail ne serait plus un labeur esclavagiste mais un rôle social permettant à la société Utopienne de subvenir à ses propres besoins en excluant l'importance de l'argent de l'intérêt général (d'ailleurs l'or n'est qu'un métal qui orne les esclaves en Utopie); ainsi l'importance de la diminution du temps de travail est loisible à chacun si elle n'entrave pas la production nécessaire. D'ailleurs l'oisiveté est proscrite en Utopie mais la tache n'appelle pas forcement le physique, elle permet l'exercice de l'esprit et des lettres.
Concernant la gestion des villes, Raphaël fait remarquer que chaque prince (maire aujourd'hui) est élu pour une période déterminée afin que ce dernier ne cherche pas à s'approprier le pouvoir à des fins personnelles.
A propos de la peine de mort je vous cite un petit extrait de ce livre écrit au début du 16ème siècle:
"....Pourquoi tuer un assassin ? Un homme qui travaille disent-ils (les utopiens) est plus utile qu'un cadavre; et l'exemple d'un supplice permanent inspire la terreur du crime d'une manière bien plus durable qu'un massacre légal qui fait disparaitre en un instant le coupable" Qu'ajouter à cela ? Sans vouloir prendre partit, avouons qu'au 16ème siècle prendre de telles positions en a mené plus d'un au bûcher où au pilori.
Très étonnant encore cette vision très marxiste de la communauté:
"Les Utopiens appliquent en ceci le principe de la possession commune. Pour anéantir jusqu'à l'idée de la propriété individuelle et absolue, ils changent de maison tous les dix ans, et tirent au sort celle qui doit leur tomber en partage".
Les idées Utopiennes qui font écho à nos sociétés modernes du 20ème et 21ème siècle sont encore très nombreuses dans cet ouvrage; aussi il est vraiment interessant à déchiffrer car au delà des idées "positives" qu'il dégage, ce livre laisse toutefois l'espace au doute. D'abord parceque le récit de cette société utopienne est celui d'un adjuvant, Raphaël, entre sa vision de l'Utopie et celle de Thomas More qui semble plus nuancée quand il dit à la fin de l'ouvrage:
"....
Car si, d'un côté, je ne puis consentir à tout ce qui a été dit par cet homme (concernant la communauté de vie et de biens sans commerce d'argent notamment), d'un autre côté, je confesse aisément qu'il y a chez les Utopiens une foule de choses que je souhaite voir établies dans nos cités. Je le souhaite plus que je ne l'espère."En somme, l'Utopie est un ouvrage vraiment interessant et rapide (124 pages) qui permet un regard objectif à un moment donné (16ème siècle) et sa transposition avec le recul et l'expérience des choix sociétaux exercés depuis lors. Rien que pour ça, l'ouvrage mérite qu'on s'y interesse et j'ai pu constater (c'est mon avis) à quel point finallement le monde est demeuré dans une certaine inertie.
Ma note: 4/5